Les élites françaises en 2019 :
Comme beaucoup de Français, nos élus se passionnent pour les feuilletons télévisés. Certains se seront même levés en pleine nuit pour l’épisode final de «Game of Thrones».
Depuis six semaines, chaque nuit de dimanche à lundi, Aurore Bergé se réveille invariablement à 2 h 55. Crise d’insomnie ? Non, un virus tenace, qui a contaminé une partie de la classe politique. Comme nombre d’abonnés de la chaîne OCS, la députée macroniste suit en direct la diffusion aux Etats-Unis de la huitième et ultime saison de « Game of Thrones » (GOT), la série qui relate les rivalités de sept familles pour s’emparer du trône de fer.
Sous les costumes médiévaux et les combats d’épées, l’intrigue s’avère hautement politique. « Les luttes d’influence, les alliances qui se constituent et se dissolvent. Je suis fascinée ! », s’enthousiasme-t-elle. « Je rêve de chevaucher un dragon… », avoue même l’élue LREM en référence à Daenerys, « mère » de trois dragons.
Ce lundi soir à 21 heures, Bergé regardera la diffusion française de l’ultime épisode avec son ami Gabriel Attal, fondu au point d’avoir fait des paris sur le dénouement. Et de projeter le manichéisme du scénario sur la bataille électorale en cours. « J’aimerais bien qu’on arrive à battre les White Walkers (NDLR : marcheurs blancs) du Rassemblement national ! », rigole le secrétaire d’Etat à la Jeunesse, en allusion à l’armée des morts qui affronte celle des vivants.
Dans la majorité, ils sont nombreux à se délecter de cette saga épique. « Ma vie de ministre était compliquée avec les séries », confesse Benjamin Griveaux, ex-porte-parole du gouvernement qui brigue la mairie de Paris. Comme Sibeth Ndiaye, qui lui a succédé.
Marlène Schiappa, elle, avoue un penchant pour les personnages féminins « audacieux, méchants, avides de pouvoir ». Et le héros Jon Snow ? « Un gentil looser passif », moque la secrétaire d’Etat à l’Égalité hommes-femmes. Sa favorite est la jeune Arya Stark, qui s’endort en récitant les noms des ennemis qu’elle compte éliminer. « Moi aussi, j’ai ma liste de gens ! plaisante - à peine - la ministre. Parfois, je rêverais d’être Daenerys qui ordonne à ses dragons : Dracarys ! pour brûler des gens… »
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Ministre des Armées, Florence Parly est - évidemment - fan du « Bureau des Légendes »' de Canal +, plongée dans le quotidien des espions français. Le patron de la diplomatie Jean-Yves Le Drian se passionne pour la série canadienne « Les enquêtes de Murdoch » et apprécie le plus franchouillard « Candice Renoir » sur France 2.
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François Hollande a adoré le « Bureau des légendes », et regardé la première saison de « Baron Noir ». Consommateur compulsif, Nicolas Sarkozy a tout vu, de l’historique « Borgia » au très incorrect « Breaking bad », histoire déjantée d’un prof atteint d’un cancer qui se lance dans le trafic de drogue. Ces temps-ci, il en pince pour « Broadchurch 2 ».
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Boulimique, le fondateur du FN a aimé « Breaking bad », « Marseille », « Suburra », etc. Abonné à Netflix, il s’est passionné pour « Narcos » - il s’est rué après sur la biographie du fils de Pablo Escobar – et le sulfureux « House of cards », bagarre pour le Bureau ovale où tous les coups sont permis. « Plus c’est violent, plus il aime », glisse un proche.
Sa fille aussi profite de ses temps de transport pour en visionner sur sa tablette. Fan de GOT - elle n’a pas vu la dernière saison -, Marine Le Pen admet un faible pour le nain Tyrion, fin stratège et bon vivant, mais n’apprécie guère le héros Jon Snow : « Trop mou. Je n’aime pas les gens qui subissent.» Elle a été « absolument subjuguée » par « La Casa de papel », récit d’un rocambolesque braquage. « Une drogue dure, difficile de s’en arracher ! » raconte-t-elle, ravie de découvrir une réalisation espagnole dans un secteur « trusté par les Etats-Unis ».
A droite, on veut plus de Français sur Netflix
Comme elle, plusieurs élus de droite addict aux séries soulignent ce regret : la sous-représentation des productions françaises sur la plateforme Netflix. Valérie Pécresse, qui en regarde sur tablette en faisant du sport, ne manque donc pas une occasion de valoriser les œuvres françaises subventionnées par la région Ile-de-France qu’elle préside, comme « Baron noir » et « Vernon Subutex ».
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